La Haute Ecole de Joaillerie forme les professionnels aux défis de la durabilité

ECOLES-FORMATIONS, JOAILLERIE

12 Déc 2022

La durabilité n’est pas seulement un mot dans l’air du temps. Tant pour les entreprises que pour la société, c’est aujourd’hui une obligation. Il en va de notre pérennité et de la planète que nous voulons laisser après notre passage. La Haute Ecole de Joaillerie (HEJ) est le seul organisme de formation aux métiers de la bijouterie-joaillerie à avoir intégré cet enseignement dans son programme. Elle prépare les professionnels du secteur et initie les étudiants aux spécificités de la durabilité.

« La durabilité est aujourd’hui incontournable, c’est une réalité qui s’impose à toutes les entreprises et qu’elles doivent nécessairement intégrer », explique Michel Baldocchi, directeur général de la Haute Ecole de Joaillerie (HEJ). « Nous avons mis en place depuis l’année dernière une formation sur la durabilité pour la bijouterie-joaillerie, qui s’adresse aux entreprises et qui est ouverte à tous les professionnels du secteur ». Elle s’inscrit dans le cadre de la formation professionnelle continue et son programme est détaillé sur le site hauteecoledejoaillerie.com.

La célèbre école de la rue du Louvre à Paris, fondée en 1864, représente l’école du métier de la bijouterie-joaillerie depuis 150 ans. Elle répond aux besoins de formation des entreprises du secteur et propose une gamme complète, avec toutes les formations possibles pour les métiers de la bijouterie-joaillerie. Différentes filières correspondent à tous les pans d’activités. L’école compte trois départements : formation initiale (pour les plus jeunes qui cherchent à se former à l’issue du Bac) ; le Centre de Formation des Apprentis (CFA) qui représente l’alternance et propose des formations en lien avec les métiers de la fabrication ; la formation professionnelle continue (créée en 1972, avec l’offre la plus complète en termes d’univers et de dispositifs de formation).

En 2022, le sujet de la durabilité a aussi été ajouté au niveau des enseignements initiaux, c’est-à-dire pour des jeunes qui préparent un certificat supérieur de joaillerie et pour les apprentis. Bien entendu, cette formation est pour eux davantage une sensibilisation à la durabilité car ces étudiants ne se destinent pas encore à faire appliquer les process des différentes certifications mais ils y participent, parce qu’ils sont acteurs et représentent de futurs professionnels.

L’initiation au concept de durabilité a par conséquent été ajoutée au programme général et est enseignée au même titre que la technologie professionnelle, l’histoire de l’art, la gestion ou l’économie. La Haute Ecole de Joaillerie représente le seul organisme de formation aux métiers de la bijouterie qui ait intégré ce sujet dans sa formation.

Obligation légale pour les entreprises

Du côté des entreprises, la durabilité est de toute façon une obligation légale et est liée aux différentes certifications qui structurent la branche. La plus connue des certifications qui intègrent des notions de durabilité est celle du RJC (Responsible Jewellery Council), organisation international à but non lucratif, qui regroupe un millier d’entreprises et les fournisseurs de l’horlogerie et de la bijouterie-joaillerie, pour promouvoir des pratiques responsables. Les entreprises membres mettent en place des politiques qui respectent des enjeux éthiques, sociaux, environnementaux et s’engagent à travers une certification.

Il n’y avait pas de dispositif d’enseignement spécifique sur cette réalité avant que la Haute Ecole de Joaillerie n’instaure une formation pour les entreprises. Elle rappelle qu’il leur est aujourd’hui demandé d’être plus transparentes, d’agir de manière responsable et de créer de la valeur ajoutée à long terme pour la société. La durabilité permet d’affronter les défis sociaux et environnementaux actuels. Pour les entreprises, il s’agit de répondre aux attentes, de se distinguer, de réduire ses risques et de séduire de nouveaux clients.

Créer de la valeur ajoutée

L’objectif est de sensibiliser les entreprises du secteur de la bijouterie-joaillerie aux enjeux actuels et de proposer des pistes d’améliorations potentielles.

Toutes les entreprises de la branche sont concernées par cette formation. Que ce soit au niveau de la direction de l’entreprise : responsables et collaborateurs engagés ou prêts à s’engager dans une démarche de durabilité pour leur entreprise. Ou bien, au niveau des différentes fonctions : durabilité, achats, finance, juridique, ressources humaines, production, R&D, logistique, santé-sécurité-environnement, commercial, boutiques, création, marketing, communication, SAV.

Ce cursus HEJ, cohérent et spécifique à la bijouterie-joaillerie, est constitué de six modules combinant présentations, discussions, travaux individuels et en petits groupes. Les professionnels qui participent à la formation sur la durabilité découvrent ainsi ses enjeux et comment mieux l’intégrer à leur entreprise afin de créer de la valeur ajoutée.

Ils se préparent notamment à Watches & Jewelry Initiative 2030, un projet lancé à la fois par les groupes Richemont et Kering, avec la participation notamment de la CIBJO (Confédération Internationale de Bijouterie, Joaillerie, Orfèvrerie des diamants, perles et pierres). Le contenu de ce projet est en train de se mettre en place et ne comprend pas encore d’actions concrètes. Il porte notamment sur le réchauffement climatique, la traçabilité des ressources, la protection de l’artisanat, les ressources humaines inclusives envers les minorités, etc.

Beaucoup d’entreprises agissent déjà de leur côté. Un club RSE (Responsabilité Sociétale des Entreprises) se met en place. Cette structure permet par exemple d’organiser des conférences à destination des écoles.

« Cette évolution sociétale est non seulement, indispensable et incontournable mais surtout, elle est obligatoire. Il n’y a plus le choix aujourd’hui, elle est intégrée dans les certifications, avec des objectifs fixés pour les entreprises et un contrôle de ces objectifs », explique le directeur général de la Haute Ecole de Joaillerie de la rue du Louvre.

Traçabilité et recyclage

Les spécificités de la durabilité dans le secteur de la bijouterie-joaillerie sont liées à l’utilisation des matières et matériaux : métaux, pierres mais aussi, process de fabrication. Une traçabilité doit obligatoirement être mise en place. La filière de la bijouterie-joaillerie est particulièrement vertueuse parce qu’elle pratique la durabilité depuis très longtemps, du fait de certifications déjà mises en place mais aussi, parce qu’il s’agit d’une industrie dans laquelle l’on recycle, de manière naturelle, l’or comme les gemmes. Par exemple, en transformant les bijoux de nos grands-mères en pièces plus contemporaines. Cela s’est toujours fait car les matières précieuses, par définition, coûtent cher. D’autres secteurs d’activité ne peuvent pas aussi bien recycler, notamment celui de la mode, du fait des textiles qui ne se transforment pas facilement et ont une durée de vie courte. Avec une vieille robe, tout au plus, on fait des chiffons. En bijouterie, on peut réutiliser le métal et refaire un objet complet.

Aujourd’hui, les certifications ont des exigences qui ne touchent pas que le recyclage des matériaux et des métaux : elles touchent toutes les méthodes de travail, l’utilisation des ressources, et sont intégrées dans ces formations mises en place par HEJ.

La durabilité représente par conséquent un véritable enjeu, constitué de process qu’il faut mettre en place : développement durable, produits durables, fin du gaspillage.

Comme le rappelle Michel Baldocchi, directeur général de la Haute Ecole de Joaillerie, « jusqu’à ce jour, la devise de la Haute Ecole de Joaillerie tenait en trois mots : histoire, marché, métiers. Histoire, parce qu’il s’agit de culture. Marché, pour le secteur économique que représente la joaillerie française. Métiers, dans leur grande diversité : joailliers, sertisseurs, designers, infographistes, prototypistes, vendeurs, etc. Un quatrième terme pourrait être désormais ajouté : durabilité ».

Carine Loeillet

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